L. Vinciguerra, Celui qui parle. Science et roman

Paris, Hermann, coll. "Collection Cahiers d'histoire et dephilosophie des sciences", 2019. ISBN: 9782705697914. 350 p. 

À la Renaissance, le roman traverse une crise qui le conduit à prendre des formes paradoxales. De cette crise naîtront les formes romanesques de l’âge classique, en lesquelles sont renouvelées les modalités de la mise en récit et de la place du narrateur, ainsi que la manière pour le roman de construire un univers fictionnel. Au même moment ont lieu de grandes transformations scientifiques fondatrices de la modernité : invention de la physique galiléenne,  de l’algèbre symbolique, de la perspectiva artificialis, de la matière-étendue cartésienne. Ne relèvent-elles pas aussi d’une nouvelle mise en récit ? Le cosmos infini de la nouvelle physique a-t-il à voir avec la nouvelle manière pour le roman de faire monde ? N’y a-t-il pas, dans le nouveau récit de l’équation, une voix narrative qui répond à celle qui émerge au même moment dans le roman ?

L'ouvrage analyse les transformations de l'algèbre à la Renaissance qui conduisent, depuis l'Ars magna de Cardan, à l'invention de l'algèbre symbolique chez Viète, puis à la Géométrie de Descartes, en passant par Peletier du Mans ou Forcadel. Il montre dans l'histoire de l'algèbre la mise en scène progressive dans le texte mathématique du savoir partiel du mathématicien, à la fois narrateur et personnage de son propre récit.  D'autres chapitres abordent la question du mouvement de la Terre chez Galilée, ou de la théorie scientifique de la perspective au XVIe siècle, chez Simon Stevin et Vignole.

Ces analyses de séquences d'histoire des sciences s'entrecroisent avec celles des œuvres  romanesques, depuis, en préliminaire, les romans de chevalerie de Chrétien de Troyes jusqu'aux romans précieux de Georges et Madeleine de Scudéry, en passant par Herberay des Essarts, Aneau, Hélisenne de Crenne, Honoré d'Urfé, Sorel, etc. À travers cette succession d'études, l'auteur montre la solidarité profonde qui unit les problèmes du roman à ceux qui conduisent, entre la Renaissance et l'âge classique, à la naissance de la science moderne et, avec elle, au dualisme cartésien de l'esprit et du corps.

À travers ces questions, ce livre invite aussi à une nouvelle manière de faire de l’histoire des sciences : non pas une histoire des concepts ou des méthodes, ni une histoire des pratiques et des styles, mais une histoire des modes d’intervention dans la science de celui qui en raconte le récit, modes d’intervention dont dépendent les méthodes et les concepts.

 

Sommaire

Entrée 1. Porte des sciences ............................................................................... 7

Entrée 2. Porte des romans .............................................................................. 23

I. Chevalerie : le récit divisé ............................................................................. 47

Ermites et pucelles ........................................................................................... 47

Allégorie ........................................................................................................... 67

Regard dans le jardin d’Amadis ........................................................................ 73

La Prison d’amour ................................................................................................... 79

II. L’impossible charnière .................................................................................. 87

Perspective 1 : Simon Stevin ....................................................................... 87

Celui qui ment : le roman d’Alector ............................................................ 102

Image, signe, chose ................................................................................. 118

La voix du mathématicien et l’inconnue des équations .................... 121

Les Angoisses douloureuses ................................................................... 158

Interlude pastoral ........................................................................................ 172

III. Clôture des images ................................................................................ 177

Perspective 2 : Vignole, l’image partout dans l’image ....................... 177

L’Astrée : encore des images ....................................................................... 191

L’écriture raturée de L’Astrée ....................................................................... 205

Une histoire de sémantique ? ...................................................................... 210

« Il faut savoir que toutes les choses du monde

se représentent réciproquement » : Charles Sorel ................................ 239

IV. Le narrateur effacé ................................................................................ 269

La vraisemblance et la catastrophe .............................................................. 269

Les effets de la parole ................................................................................. 280

« Car j’ai donné un nom grec à un Africain » ........................................ 285

Oresme : « Cet homme qui est porté avec le ciel » .............................. 295

Galilée : « Montrer le soleil à la Chine » .................................................. 304

Conclusion .................................................................................................. 315

Annexe : et après ? ..................................................................................... 321

Liste des ouvrages cités ..................................................................................... 341

http://www.editions-hermann.fr/5475-celui-qui-parle-.html

Source: Fabula

 
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