Une série de recueils collectifs de poésie satyrique (satire inspirée de la figure du satyre grec), parfois brutale à l’égard des adversaires qu’elle se donnait, mais aussi grivoise, obscène, érotique ou pornographique, parut en France entre 1600 et 1622 : cinquante-trois volumes (édités rapidement, de manière souvent négligée), environ mille six-cent poèmes et cent cinquante poètes identifiables envahirent la marché de la librairie. Un tel phénomène éditorial soulève un ensemble de questions et de problèmes passionnants. Comment interpréter une production poétique aussi massive et circonscrite dans le temps ? Comment analyser un corpus de tant d’auteurs et dont les conditions de publication font planer le doute sur les attributions des poèmes ainsi que sur leur conformité avec une première circulation manuscrite ? Qu’est-ce qu’une satire quand elle semble promouvoir des représentations périmées de la société ? Que dit-elle d’essentiel sur le monde qui la vit paraître ? Comment l’appréhender, quand les différents acteurs de la publication (auteurs, éditeurs, imprimeurs, collecteurs de textes) n’ont guère donné d’indications concernant un éventuel projet satyrique ? A partir de la notion d’effets de recueils, c’est-à-dire en réfléchissant aux poèmes à partir de leur insertion dans des séries (de motifs coordonnés, de textes, de recueils) et des différents effets produits par la masse imprimée, on analyse la manière dont la satyre produit sa propre légitimité dans le champ poétique, mais aussi les discours ou représentations qu’elle véhicule. Par là, on se donne les moyens de proposer des pistes d’interprétation pour cet événement littéraire révélateur d’une crise de la poésie et, peut-être, de la masculinité au seuil de la modernité.
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