Louvain, Peeters éd., La République des Lettres, 67 & 68, 2019.
I. Providences romanesques. ISBN: 978-90-429-3990-5. 459 p. 79€.
II. L'espace dialogique du roman. ISBN: 978-90-429-3991-2. 487 p. 79€.
I. Providences romanesques.
Ce volume rassemble une trentaine d’études sur la double signature du roman. Est-ce que l’histoire racontée dans un récit remonte à un livre composé d’avance ? Est-ce qu’une autre main que celle de l’auteur laisse des traces dans le texte ? Le roman d’Ancien Régime apparaît en effet comme un texte doublement ‘signé’ : par un écrivain-Dieu, le romancier, et par un Dieu-écrivain, auteur d’un Grand Rouleau écrit au Ciel. Le lecteur peut repérer dans le texte qu’il lit les traces de la main d’un écrivain-Dieu qui crée l’univers diégétique ; les personnages ne s’aperçoivent pas de ces traces, mais elles voient celles d’un autre créateur, qui est le Dieu-écrivain, dont ils croient qu’il règle leur Destin. Lecteur et personnages ne s’aperçoivent pas des mêmes signatures. Providence, Destin, Fortune, sort, libre arbitre, grâce divine, chance, hasard, occasion, ... sont des idées qui contredisent le pouvoir du romancier dans la mesure où elles renvoient à l’existence d’un Dieu-écrivain qui compose non pas le livre que nous lisons, mais le Livre des Destinées. L’objet de ce volume est d’étudier comment, au Siècle des Lumières, les différents types de romans – picaresque, sentimental, libertin, etc. – et de contes – philosophique, moral, esthétique, etc. - gèrent cette situation de la double signature de l’œuvre.
http://www.peeters-leuven.be/boekoverz.asp?nr=11183
II. L'espace dialogique du roman
À un âge où les Lettres sont encore largement gouvernées par la Rhétorique, la narration fictionnelle se légitime par l’argument qu’elle véhicule. En interférant constamment avec les autres discours - philosophique, moral, théologique, esthétique ... - qui composent le système discursif de l’époque, le roman ‘informe’ la narration d’un argument et propose à son lecteur différents contrats de lecture.
Comme le savait déjà M. Bakhtine, le roman est en soi un massif stratifié et hétérogène de discours qui interagissent au sein d’une narration. Le roman fait dialoguer la partie avec le tout, le oui avec le non, le long avec le bref, le privé avec le public, le même avec l’autre, le présent avec l’absent, etc. Si le roman est en premier lieu un récit, la spécificité de la narration romanesque est d’être plurilingue, plurivocale et polémique. Le discours romanesques du XVIIIe apparaît dans ce volume comme un espace dialogique et un lieu d’interférence discursive où l’on peut prendre le pouls au temps.