Les approches et pratiques numériques ont profondément transformé notre regard, nos objets et nos méthodes d’analyse. Elles ont renouvelé l'accès à des genres, des corpus et des auteurices oublié·e·s, minoré·e·s ou difficiles d'accès, elles ont permis la diversification des questions, des sujets et du canon, elles ont renouvelé nos perspectives et décentré notre regard grâce aux visualisations, aux nouvelles cartographies et aux méthodes computationnelles. L'horizon nouveau de la transition numérique soulève cependant des questions de fond, notamment celles de la pérennité et de la conservation ; des modes de publication ; des problématiques écologiques, déshumanisantes et éthiques (récemment, le vocabulaire et la fabrication des IA génératives). Elle est l'occasion d'adopter des points de vues extra-européens, elle nécessite de repenser la place faite à la matérialité et au texte ; l'articulation des échelles et de la représentativité ; la singularité des objets passés et de tout ce qui résiste à la transformation en données, sous peine de réitérer les schémas de domination et de déshumanisation que les études de genre et post-coloniales ont mis en lumière. Enfin, l'usage de ces nouvelles technologies, la réflexion sur ce qu'elles font à nos pratiques d'écriture et de lecture, éclairent d'un nouveau jour les pratiques littéraires anciennes : les avancées technologiques du XVIIe siècle, ses expérimentations littéraires, ses voyages et journaux, ses navigations et ses découvertes sont plus accessibles, plus lisibles et prennent d'autres sens. La culture numérique nous incite à envisager nos objets à partir des technologies modernes (à commencer par la métaphore de la navigation), elle fournit de nouveaux modèles pour penser les usages sociaux de l'écrit et nous invite à interroger des réalités techniques que le passé nous a léguées en héritage.
Organisée à Lorient, ville de la compagnie des Indes et du Soleil d'Orient, et à l'Université Bretagne Sud, spécialisée dans l'édition numérique et l'IA, cette 51e édition de la NASSCFL est l’occasion de réfléchir à cette évolution majeure des études sur le XVIIe siècle. Elle invite les spécialistes de la période, praticien·ne·s du numérique ou non, à se réunir pour penser, critiquer, souligner et mettre en perspective ce que le numérique fait et peut faire à nos méthodes et à nos objets. Qu’il s’agisse des moyens d’accès — la consultation des ouvrages numériques, leur citation, les modes de publication —, des projets menés, des questions soulevées ou des nouvelles responsabilités qui nous incombent, nous sommes toustes concerné·e·s, d’une façon ou d’une autre, par le numérique. En retour, il s’agit également de souligner tout ce que les études sur le XVIIe siècle apportent à la réflexion contemporaine sur les nouvelles technologies.
Comme indiqué dans les axes d’étude suggérés ci-dessous, il n'est pas nécessaire que les contributions intègrent une dimension numérique. C'est la mise en dialogue des compétences, des regards et des approches (analogiques ou numérique) qui permettra une réflexion féconde. Les formats possibles incluent des communications traditionnelles, des groupes de travail autour d’articles, de textes sources ou de corpus (en vue, par exemple, d’une édition numérique), des projets, des tables rondes et des panels déjà constitués. Le congrès proposera également une initiation à l’édition numérique et des réflexions collectives sur les manières d'intégrer une dimension numérique dans nos projets de recherche.
Les propositions de 300 mots + bio-bibliographie sont à envoyer jusqu’au 15 octobre à l’adresse :
— Axes suggérés —
Supports et médias
- Lire le XVIIe siècle, entre papier et écran
- Nouvelles formes d’accès à la littérature du XVIIe siècle
- Performances numériques et études théâtrales
- Support et écriture : fragmentation et formes fragmentaires
- Livres en réseaux : recueils et collections
- Marginalia et annotations numériques
- Remédiation, intermédialité à l’ère numérique
- Au-delà du texte : corpus sonores et visuels
- Conservation du livre, pérennité du numérique
Nouveaux horizons, nouvelles perspectives
- Jeux d’échos : lire le XVIIe siècle au prisme des pratiques numériques
- L’esclavagisation et ses technologies : de la flétrissure aux fermes d’IA
- Voix perdues et responsabilité : réemergences et republications de textes oubliés
- Récits de voyages : décentrer l’Europe
- Nouveaux mondes numériques
- Naviguer, du Soleil d’Orient à la boussole de Safari
- Sociabilité et réseaux sociaux : par le livre, par la correspondance, par le numérique
- Voir le XVIIe siècle : reconstitutions, infographies et visualisations de données
- Anciens et Modernes au XVIIe siècle, Anciens et modernes dans le monde numérique
- IA et réseaux neuronaux appliqués au XVIIe siècle
Numériser le XVIIe siècle
- De la publication (numérique) : pratiques , autorité, valorisation, citation
- Archives numériques : absences, présences, dissimulations
- Philologie numérique : datafication et numérisation de la littérature
- Interfaces, interprétation et perception
- Approches computationnelles, approches sensibles
- Évolution ou disparition des corpus et questions d’échelle
- Inclusion et accessibilité
Le XVIIe siècle et la technologie
- Technologies du livre, technologies du numérique
- Pratiques cartographiques
- Genre et techniques, de Poullain de La Barre aux Women in Tech
- Scientificité et illusion de scientificité
- Machines : imaginaires techniques du XVIIe siècle
- Protocoles, standardisation, alignements, de l’administration Colbert au numérique.